Dimanche 19 avril
Mais il est où Thomas ?
Bien sûr aujourd’hui nous le trouvons sympathique cet apôtre impertinent, qui n’hésite pas à interrompre Jésus en mode adolescent contestataire, alors que Celui-ci n’annonce rien de moins que sa mort prochaine : « Comment pourrions-nous savoir le chemin, nous ne savons même pas où tu vas. Jean 14,5 »
Il nous rassure finalement avec ses remarques bougonnes et nous fait sourire…peut-être aussi parce que nous connaissons la fin de l’histoire.
Mettez vous maintenant 5 minutes à la place de Pierre et de ses 9 autres compagnons.
Depuis le drame de la crucifixion ces hommes là vivent dans la peur, la menace tourne autour d’eux. Et si eux aussi allaient être arrêtés, suppliciés ? Le plus sûr est donc de s’auto-confiner, de tirer les verrous, et de se tenir ensemble pour conjurer l’angoisse, ensemble oui mais sans Thomas qui a décidé de la jouer solo. Mais que fait-il ? Et s’il allait trahir lui aussi ? Êtes vous bien certain que cette question n’est passée par l’esprit d’aucun de ses compagnons ?
L’évangile ne peut être un énoncé de bons sentiments ou alors il n’aurait rien à dire notre vie. Nous voyons bien aujourd’hui qu’il ne nous est pas facile de garder une conduite équilibrée quand notre environnement le plus proche est secoué par une crise dont on perçoit, même sans l’exprimer, la menace pour notre propre vie. La pression sur les épaules des apôtres de Jésus devait être encore d’un tout autre ordre quelques jours après sa mort. Aussi, Thomas est sans doute lui même devant ses propres peurs, il a besoin de champ, d’espace et il le prend.
La communauté des apôtres n’est certainement pas cette équipe unanime que nous imagions parfois, seuls justes dans un monde ligué pour leur perte. Les choses sont forcément beaucoup plus imbriquées, beaucoup plus tendues aussi, cependant ils « tiennent » ces hommes, en arrivant même à faire vivre entre eux une certaine unité.
C’est ainsi que nous les retrouvons une semaine plus tard et cette fois ci Thomas est bien là avec eux. Il a vaincu sa peur, ou ses doutes, ou les deux à la fois.
Aucun reproche, aucune mauvaise parole n’est exprimée alors même que Thomas s’est démarqué nettement du témoignage de ses compagnons, et Jésus est là présent au milieu d’eux. « Tu voulais voir Thomas ? Regarde voici mes mains ! Tu voulais toucher ? Mets tes doigts dans mon côté. »
En réalité ce qui se dit ici est bien plus que la patience d’un père pour un enfant soupçonneux, mais plutôt la prévenance de notre Dieu qui nous économise les justifications et prend soin de lever lui même les obstacles que nous avions dressés pour empêcher la rencontre d’avoir lieu. Encore faut-il le reconnaître ? Et c’est cela la grandeur de Thomas, reconnaître que le plan de Dieu est bien plus haut que les petites exigences dans lesquelles il l’avait méticuleusement cantonné.
Le temps qu’il nous est donné de traverser ces dernières semaines n’est pas le plus facile, parce que même sans manquer de rien, nous ressentons très durement son incertitude, et sa pesanteur à certains moments. Mais c’est aussi un temps pour retrouver le Seigneur, pour lui laisser lever les obstacles de notre propre chemin et venir jusqu’à nous. Lorsque les choses se clarifient, se simplifient en nous mêmes alors nous pouvons être sûr de sa présence : « Regarde vois mes mains ! Avance ton doigt dans mon côté, cesse d’âtre incrédule, sois croyant. Amen ! Mathias